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sexe - Page 10

  • " L'embarquement pour Cythère."

    zvania-pensieri.jpg Je retournerais en Corse, tout à l’heure, au printemps.

    Dés que les journées seront molles et blanches comme du bronze que l’on brûle aux fourneaux des fonderies, les clartés du ciel à l’espérance, les vagues échouées contre les flancs des Sanguinaires doucement tiédies par le souffle de lave d’un volcan englouti; en regain, les bourgeons poreux comme des sexes aux bois fendus des vergers Balanins;  j’y retournerais ainsi que chaque année depuis plus de dix années, pour deux petits jours ou pour une grande semaine si on m’en laisse le loisir.

    Je mettrais mes pas dans la poussière de nos pas, Julien.

    Seul.

    Je n’irais pas en naufrage, triste et laid, accablé, au cimetière marin des amours mortes cueillir de mes mains nues ces orties blanches et qui ne me mordent plus de leurs acres dents vertes depuis que j’aime ailleurs.

    J’irais au contraire, souriant et libre, badaulant par des sentiers vifs ou fleurit, rose et émue , l’aubépine , la bruyère dont le ventre sec donne de jeunes pousses violettes mais pas de fruits, le Ciste aux vivaces ombrelles insouciantes et l’asphodèle en champs de chandeliers d'argent, j’irais embrasser la beauté du monde là ou elle est la plus belle, comme j’embrasse la beauté des hommes à l’endroit ou elle est nue, violente et charnue.

    De la Corse avant Julien, je ne connaissais que ce que les mauvais journaux en disent.

    Je la pensais hostile, dangereuse, aride, peuplée d’assassins errant dans des déserts de ronces et de femmes affligées, pleurant des cris de haine sous les pointes tragiques de leurs foulards de deuil, tandis que leurs doigts de harpies égrenaient des rosaires de malédictions.


    Sans faire l’effort de comparer, nous lui préférions la Sardaigne ou plutôt ce bout de Sardaigne qui de Palau à Olbia contourne la Gallura et dont Karim Agha Khan, que les Corses du reste à qui il s’adressa en premier avaient joliment renvoyé aux rousseurs Hollywoodiennes de ses fantasmes atomiques, entendit transformer dans les années soixante, en ghetto pour milliardaires, destiné à mettre au tapis un Saint -Tropez alors en plein essor.

    Saint –Tropez, nous n’y allions plus depuis que mes tantes, Liouba, Stassia, Sasha, pour une fois soutenues par la blonde idole d’acier me tenant lieu de belle mère, trouvaient la presqu’ile trop « plouc » pour leurs bikinis griffés et les babioles de chez « Cartier », ces ludiques « bijoux-de-plages », qu’elles exhibaient tintinnabulants d’or blanc, jaune, rose à leurs chevilles serviles de premières concubines.

    A la remorque d’un ami qui y possédait une maison nous avions atterris à Porto Cervo ou nous avions pris racine, ravis d’un changement à vrai dire peu notable, puisque le village n’était que le calque Italien, ni plus ni moins élégant, d’un Saint –Trop soudain livré aux barbares.

    « - Oui, c’est vrai, ça ressemble ! Mais ici tu vois, il y a Flavioooo ! concédait Sasha en multipliant des « O » ahuris de poisson lune à la fin du prénom.

    Flavio, c’était Briatore, un ancien moniteur de ski qui donnait depuis que la fortune et les industries Benetton lui avaient sourit, dans la formule 1, le foot Britannique et la pétasse de haut vol.


    Copropriétaire du « Billionaire », complexe prétentieux au luxe tapageur ou il fallait être vu lorsqu’on séjournait sur la Costa Smeralda sous peine de renoncer à toute existence sociale décente, Flavio avec tous ses « O » était devenu l’obsession d’une Sasha pourtant plus couguar que panthère, bien décidée à ancrer ses griffes laquées de « Rouge-Jungle » au plus profond du matelas de Dollars sur lequel reposait le play-boy.


    Dire qu’elle passait ses nuits au « Billonaire » serait un doux euphémisme tant la belle peinait à regagner la maison une fois l’aube venue. Car si Flavio Hé-Ho, Hé-Ho lui préférait à l’époque les courbes d’ébène de Naomi Campbell, une pompe à fric professionnelle hautaine comme une reine de Saba dont elle possédait certes l’allure de divinité Ethiopienne et les ruses vénéneuses mais point hélas la science ni même le gout des énigmes , Sasha n’en maigrissait pas de dépit pour autant , trouvant de fort salutaires consolations entre les bras de jeunes Romains que nous soupçonnions d’avoir pollués de leurs premiers émois les pages des « fumetti » dont ma tante avait été l’héroïne.

    Quant à moi, tellement cuit de soleil que l’on me croyait métis, j'entamais des recherches passionnantes en vue d'une anthologie de la verge Italienne, si appliqué, si concentré, si âpre à la tache qu’il arrivait parfois, de retour à Paris, que mes extases Franco-françaises sonnassent en clairon dans la langue de Dante. Je vous laisse imaginez l’ahurissement de mes amants Gaulois lorsque je les insultais, les encourageais, les suppliais dans un sabir mêlé de patois Sarde, de Calabrais et d’Argot Romagnole qu’ils prenaient, mon accent Transalpin flanchant sans doute dans l’effort et le plaisir, pour de l’Espagnol ou du Portugais.

    « Je n'ai jamais rencontré d'Italiens quelconques et incolores. Ceux que j'ai connus étaient, ou très charmants, ou ratés. », Écrivait en 1928, Sibylle Gabrielle Riquetti, dite « Gyp », et dernière des Mirabeau, dans ses « Souvenirs d’une petite fille ».

    Je doute cependant que cette aimable Comtesse à la prose abondante, à la fois niaise et piquante, aujourd’hui bien oubliée, n’ait guère rencontré d’Italiens à la manière dont je les rencontrais moi-même, encore que je me garderais soigneusement de la contredire.

    Du reste si j’avais oublié et depuis longtemps les « ratés » lorsque je rencontrais Julien, ce dernier, ennemi atavique des « colons Pisans et Génois », n’eut qu’à me prendre la main pour que j’oublie aussitôt et, du moins le croyais je, sans espoir de retour en arrière, les « charmants » et même les formidables.

    Comme il lui suffit de m’entrainer sur son ile aux splendeurs pour que je tombe immédiatement, irrévocablement, tragiquement en amour de cet éperon de granit jeté par un Dieu tout ébloui de sa propre création, dans l’encorbellement pâle, incertain d’une mer ou se miraient la nuit venue, toutes bruissantes d'orages, toutes brulées de soleil ces vagues étoiles de la grande Ourse que chante le poète

    .Antoine Ciosi: «  Le Pinzutu. » 
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  • " Le jour, la nuit et les autres nuits."

    zzzzzzzzzzzzzzzzz-art-00000.jpgMon père s’est remarié l’année de mes seize ans, non sans avoir au préalable, en parfait homme du monde, sollicité mon consentement .

     


    Consentement que je mis, du reste, beau temps à lui accorder tant l’irruption d’une tierce personne dans le couple fusionnel que nous formions depuis le départ de ma mère me semblait halogène, barbare, contre nature.
     

    Nous parlâmes beaucoup, nous parlâmes longtemps, mon père arguant que puisqu’à présent j’avais un semblant de vie amoureuse, je pouvais admettre qu’il en ait une à son tour : que l’amour qu’il portait à cette personne blonde et glacéé n’enlevait rien à celui qu’il me vouait, bref soulevant tout un tas d’arguments, forcément sensés, que j’écoutais d’une oreille distraite tout en évaluant mentalement à quel prix je pourrais raisonnablement négocier l’abandon de mon droit de véto.


    Au terme de transactions que le plus pingre des usuriers eut trouvées mesquines, nous convînmes que je ferais bonne figure à ma future belle mère aux conditions expresses que l’on me laissât libre de sortir la nuit; quand bon me semblerait, doté, de surcroit, des subsides nécessaires à un train de vie qui me paraissait me revenir de droit divin.


    Mon père est un homme délicieux, un érudit, un artiste, un rêveur et vous l’aurez compris un grand naïf.

     A dix ans je quintuplais le montant de mon argent de poche en le battant régulièrement au poker; c’est vous dire à quel point il se complaisait dans un idéal étranger à toute réalité tangible.

    Dans le clair obscur de sa fantaisie, le monde de la nuit, auquel il me donnait plein accès, avait le velouté, la douceur, l’onctuosité d’un chocolat chaud.


    Je sais à présent, la trentaine et peut être la sagesse venues (j’entends ici les hyènes ricaner !), que naïf il ne l’était pas tant que cela. Simplement, il m’aimait suffisamment pour m'autoriser à commettre mes propres erreurs ; tout en sachant, quoi qu'il puisse arriver, qu'il serait toujours là pour me rattraper au bord des précipices.

     


    Tout cela pour vous expliquer que j’ai pris l’habitude de sortir très jeune et que, bien entendu, j’ai accumulées les conneries avec la parfaite régularité d’un métronome.
     

    Stupide, j’aimais à me prendre pour une sorte d acteur de vaudeville dont l’emploi eut été le gandin.
    Lucide néanmoins, je savais que je n'étais, en somme, qu’un rutilant piège à cons.
     

    J'étais beau, je pense. En tous cas on me courtisait.

    Mais courtisé, ne l'est on pas toujours lorsqu'on a seize ans et qu'on manque de sérieux ?
    Chaque soir, à l’heure ou la ville mourait, a l'heure où la lune flambait, à l’heure où les folles se fardaient, j’abandonnais ma défroque ordinaire pour revêtir l'habit de lumière, le costume du matador.

     
    Les nuits Parisiennes étaient mon théâtre.


    Ce théâtre, je l’investissais à la hussarde.
    Je jouais large, je jouais ample, je jouais l'aisance et l audace; chaleureux, perceptif et sexy comme une pub pour des cigarettes Américaines.

    « Try a différent flavour »


    Le contraire en somme de ce que j’étais dans la vraie vie ou l’on me regardait comme une épure, un effrayant monolithe.

    J’ignorais d’ ou cela venait ni ou cela m'entrainerait, mais la plupart des gens m'estimaient incapable d'éprouver des émotions autrement qu’en une dérive immobile ; sans qu’elles ne m’affectent réellement. Sous mes néons de couleurs, en revanche, je déplaçais du vent, je semais des paillettes, je faisais du bruit et illusion, capturant mes victimes à mon grand rire avide, au feu de mes yeux lasers, qui les fusillaient à blanc, qui les fusillaient en bleu horizon.

     


    Mon infernale exigence me commandant d'aller toujours plus loin dans la surenchère, je forçais le trait jusqu’à m’extraire de moi même.

    Je me voyais alors comme si j'étais doté d un troisième œil ; plutôt je le voyais lui, « Mauvaise. Graine », qui existait de manière autonome tel un exorcisme ou une libération.

    Toute mon énergie nourrissait ce monstre, bouleversant d’ubiquité, et il m'arrivait parfois de me sentir bon pour la camisole. Mais, si les contraintes, ce bain de regards faussés, forcément faussés, dans lequel je m'ébattais soir après soir, étaient pénibles, le jeu en lui même me grisait avec la puissance d un alcool fort.

    J’éprouvais l'ivresse d'être exactement dans le rythme de la fête ; de faire corps avec elle, d’investir miraculeusement l’œil du cyclone, le cœur du maelstrom.


    Je décrochais alors, je décollais, je voyageais long distance au sein d une dimension physique, organique, intime.

     


    Et puis lorsque la sono se taisait, lorsqu’une à une les lampes se rallumaient, j'atterrissais toujours un peu en catastrophe, la tête tournée par mes sauts d'archange émerveillé.


    On est forcement déçu lorsqu’on est exigeant. On veut donner beaucoup pour recevoir beaucoup mais on ne trouve jamais dans cet échange que ce qu’on y a mis et parfois moins, comme s’il y avait eut évaporation.

     


    Très vite, je compris que le monde de la nuit n’était qu’une échappatoire. Je me promis de ne pas y faire de vieux os. Je passerai une saison en enfer, voire deux par gourmandise, mais la gourmandise tourna à la gloutonnerie et les mâchoires du piège se refermèrent sur moi. J’aimais bien mon personnage de « Mauvaise. Graine » et les nuits vieillissaient.


    Aujourd’hui encore il m’est plus facile de me définir comme « Mauvaise. Graine » que comme V.V.S.M.

    Momifié au sein d un milieu qui, pourtant, n’est pas le mien, je n existe plus que par référence.

    Le commerce du symbole marche encore très bien, sans doute l’avez vous remarqué. Il suffit de coiffer une couronne, de se fabriquer un masque plaisant, pour paraitre et tant pis si on oublie de projeter son être dans ce paraitre. On vie alors prisonnier d’une image fortement enluminée mais totalement désincarnée comme les vedettes du cinéma ou les demoiselles du rocher. On ne se reconnait plus.


    Alors on tente une nouvelle sortie d autoroute et évidement on loupe l’échangeur.

     

  • " Depression au dessus du jardin."

    zzzzzzzzzzzzzzzv-j-0215.jpgJ’ai changé, ne me déplaise !
    Enormément ! En peu de temps !
    Est à cause du passage périlleux à la trentaine ?

    Est-ce à cause de Christophe ? De notre relation désastreuse semblant ne vouloir ricocher que dans des directions défavorables ?

    Naguère , mon énergie , ma vitalité , mon intenable impudence , cette manière éhontée de ne pas tenir en place sans jamais chercher la mienne ,de semer des tempêtes pour un tout , pour un rien , pour un tout petit rien ; de vivre mes amours comme on force un blocus , de les immoler ces amours sur des buchers aux allures de gaillards feux de plages , ce sacré chambard accompagnant la désinvolture de mes envols vers d’autres bras , d’autres draps ,d’autres impostures ; faisaient de mon existence un déluge , un océan en furie.
    Déluge, j’en ai brisé des digues, j’en ai inondé des plaines, j’en ai submergé des montagnes, dévalé des précipices.

    Océan, j’en ais fait des vagues, toutes identiques, toutes différentes!
    Berceuses de barcasses, chavireuses de chalutiers, briseuses de cargos.
    Vous n'en avez pas passé une, que déjà, la suivante se pointe en rafale.
    Elle vous prend en traitre , elle vous soulève , elle vous élève vers ce que croyez être le soleil , elle vous attire puis vous repousse , elle vous enveloppe , elle vous borde , elle vous déborde , elle vous roule , elle vous boule , elle vous envoie valdinguer dans les abysses .

    Vous avez de l'eau dans les yeux et les oreilles, du sel vert et acide dans les narines, un bouquet d'algues pourries dans la bouche ; si vous ne vous noyez pas, Dieu est avec vous.

    Ou le diable, allez savoir !

    La vie ça s'appelle la maladie que j’ai attrapée en naissant.
    La vie magistrale. La vie plus grande que la vie !
    « Biger than life » en français tel qu'on le cause.
    La vie broyeuse d'autres vies. La vie exigeante, impitoyable, immense et animale.
    La vie torrentielle !

    Mais voici que les temps changent. L’océan est une flaque, le déluge une bruine, « Mauvaise. Graine » une épave.

    La vie , ma vie , cette vie , je la régurgite en un lent , long ,lancinant écoulement , une sanie noire et malsaine , qui me laisse faible, appauvri, vagissant comme au creux d'un berceau .

    Pourquoi on se lève, pourquoi on se couche, pourquoi on bosse, pourquoi on baise, pourquoi on baise plus ?

    Pourquoi fais-je semblant d’écrire ?

    Pourquoi ses longs yeux d’ambre liquide ce sont ils changés en deux petits lacs gelés, ternes, occultes ?

    Je fus , pour l'unique fois de ma vie , un petit ami parfait , un ami parfait , un amant parfait . J'ai enchanté ses nuits, ses jours et ses rêves. Je lui ai offert des voyages autour de mon lit, des bouquets de rire, de perles, de mots. Je l’ai consolé, je l’ai cajolé. Je l’ai rendu plus beau que beau. Je l’ai baisé à m'en peler la bite.

    Je fus le roi, le fou, l’illusionniste, l'esclave accroupi.

    Je suis une cloche !

    Ce soir, nous sommes passés à un poil de cul de la catastrophe, à un frisotis du dernier Bing Bang.

    Je le voyais venir et je serrais les poings.

    Cette douceur dans la voix, cette fièvre soudaine hachant son débit, ces hésitations, ces phrases qui finissaient en soupirs, cet abandon que je ne lui connaissais pas.

    Les mots qu'il n'osait prononcer déchiraient l'opacité de son silence.

    J'ai prié : pas maintenant, pas déjà, pas comme ça !
    Il a compris, je crois.

    Il a dit : « -Bon, je me couche, moi ! Dors bien fais de doux rêve !
    « _ Ok, bonne nuit.
    « _ Tu sais, je ....
    « _ Tais toi !

    J’ai quitté la chambre.

    Deux heures du mat et des minutes.
    Fin de partie au Sans-soucis !
    Au rez -de- chaussée j’ai récupéré une bouteille de Vodka, beaucoup de glace !

    A présent, gelé comme un coing, presque délivré de la conscience de mon corps, l'esprit en déroute, le cœur calebasse battant sous des paumes africaines, j’attends de sombrer dans ce « sommeil ivre » dont parle Rimbaud.

    En pure perte !

    A cette heure de la nuit et dans l'état ou je me trouve, j’oublie d’ordinaire la cause de mes tourments.
    Je me sens même, la plupart du temps, assez d'humeur à me lancer dans des digressions illuminées sur la vie, l’amour, la coiffure, le vin.

    Le point de non retour atteint, déjà en terre lointaine, les mots me viennent comme des chocs, pitreries, agressions, jetés battus, « je-t-ai-battu », hideuses têtes d'Iokanaan au poing sanglant de Salomé.

    La logique ainsi qu’un petit pantin désarticulé, funambule sur un fil ténu, tendu entre deux paradoxes. Les idées fusent, fusionnent, s'estompent aussitôt.

    Délire, verbiage, clairvoyance.

    Références aux princes de la cuite: Baudelaire, Apollinaire, Audiard, le grand serge!

    "Dépression au dessus d'un jardin
    Ton expression est au chagrin
    Tu as lâché ma main
    Comme si de rien n'était.
    De l'été c'est la fin
    Les fleurs ont perdu leurs parfums
    Qu'emporte un à un
    Le temps assassin."

    Gonflé d’importance, pédagogue sentencieux, je cherche à me convaincre, à coups d’aphorismes d'argile, que l'alcoolisme pas plus que l'amour n'a besoin de raisons. Que l'on cherche toujours des excuses plus que des explications. Que j’aime boire moins par goût de l'alcool que pour l'ivresse qu'il procure.

    Que je bois pour oublier.

    Oublier qui ? Oublier quoi ?

    Oublie-moi toujours, jamais je ne t’oublierais.

    Le crabe dans les vapes affute ses ciseaux. L'alcool sur la plaie fait comme du sel, il brule sans cautériser. Il n'a ni beauté ni bonté.

    Pouvoir thérapeutique ?

    A dose homéopathique, sans doute.

    Quatre verres de vin te feront le cœur sain, le sang fluide, les artères souples.

    Quatre verres de vins ? Cuite mesquine !

    Moi, je bois tel un soudard, pour la destruction et la gloire.
    Gloire des armes, gloire des larmes, gloire mensongère des tréteaux, gloire des fontaines et des Bacchantes, gloire chavirante des bateaux.

    Boire pour s’oublier, se transmuter, se transformer.

    En quoi ? En objet de risée, en dindons de farces bouffonnes ?

    C'est une maladie que l’alcoolisme, une maladie honteuse.

    Les cancéreux apitoient, les alcooliques prêtent à rire. Ils quêtent de l'amour et ne récoltent que des lazzis.

    Ce soir je pourrais tuer pour une déclaration d’amour !

    Une qui aurait de la gueule, de l’allure, du panache !

    Comprenez moi, je suis comme Sophie Marceau dans " La boum 13 : Romance à l'hospice ", je n'ai rien contre le fait qu'on me dise " je t'aime "; mais pitié Messieurs, un peu de classe, un peu d’audace, un peu d'originalité !
    Soignez le décor, soignez la présentation ; mettez un costard et genou à terre. Sortez les fleurs et les confettis, les revolvers et les couteau. CInvoquez les violons de Baudelaire, les orages furibards des sœurs Brontë, le technicolor flamboyant des mélos de la «  MGM  ».

    Ne le dites pas au téléphone.

    Encore moins par SMS.

    Surtout pas sur MSN.

    Par signaux de fumée, à la limite vous le pouvez.

    A condition de vous appeler Sitting Bull, bien sur.

    Ah, vous vous appelez Christophe ?
    Glad to met You. My Name Is Graine, Mauvaise. Graine !

    Vous êtes un petit breton, fils de la pluie et des marées. Dans ce cas, donnez-vous un petit peu de mal.

    Faites rugir l’Atlantique, faites gueuler les goélands, chapardez les mots de Chateaubriand et faites m'en offrande.

    " Mon dernier rêve sera pour vous "

    Vous devez vous dire, elle est mignonne la « Mauvaise. Graine » ; mais c'est un truc de midinette que d'accorder tant d'importance à deux notes et demi de musique que certains vous chantent aussi souvent que " Bonjour comment ça va ? " dans une journée ; que de toute façon, il n'y a pas d'amour mais des preuves d'amour et patati et patalaire, l’infini à portée des caniches.

    Peut être avez vous raison.

    Moi, je suis persuadé qu’un " Je t'aime " n'est jamais innocent.
    C'est une balle de revolver qu'un " Je t’aime ».

    Ou il vous effleure sans vous blesser, ou il vous explose le cœur.

    Tant qu'a faire, s'il doit me tuer que se soit en apothéose.

    Je veux des fanfares et des vivats, des serpentins et des ballons, un ciel tonnant de 14 Juillet.

    Et tant pis si au fond, moi, je ne l’aime plus.