Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

" Almeria mon amour "


gay,sexe,bardot,almeria,michele mercier,claudia cardinale,cinema,cocaine

« - Tu peux le Croire toi ? Bien sur que tu peux le croire. C’est un pédé qui m’a appris à être une femme.Et pas uniquement dans le coté « Jolie Madame », tu vois. L’apprêt, la manière de se coiffer, de se farder, de se vêtir, de se tenir ; le maintien, tout ça !
Il m’a appris à découvrir ces riens qui font qu’une femme est une femme avec l’envie d’être encore plus une femme.


Le trouble par exemple. L’envie de se troubler, de se laisser troubler. L’abandon, le don.
Ne plus se retenir.
Le plaisir de se laisser envahir.
L’impudeur…


On décrit toujours les femmes comme des créatures pudiques. Ce n’est pas vrai, les femmes ne sont pas pudiques ; elles savent très bien faire reculer les limites de la pudeur. Elles ne craignent pas de mettre des mots sur leurs émois. Pas plus que d'avoir d'autres vies ,pleins de vies.

Le coeur fou bovaryse au travers des romans,des images.


Des musiques aussi.


Des couleurs.


Les jaunes francs de Van Gogh,le bleu monochrome d'Yves Klein ,les rouges passés presqu'impressionistes de Corot.


Elles ont des tableaux plein la tête,les femmes.


Et des fantasmes.
Des fantasmes qu’elles réalisent d’ailleurs.
Elles possèdent une connaissance spontanée de l’inconscient. Apelle ça l’instinct féminin si tu veux.


Elles savent se servir de leurs failles, de leurs déséquilibres, de leurs faiblesses. Elles sont frontales les femmes, tu sais.
Elles ne sont jamais unies, une. Vous les hommes, et les gays autant que les autres, êtes plus, comment dirais je ? Monolithiques ? Evidents ? Simplistes ?
Les femmes ont du pouvoir mais à la différence des hommes elles ne se sentent pas obligées d’en abuser, ni d’imposer les choses.

Maintenant, je suppose qu’une seule question te taraude.
Le Français me baisait il ? Et si oui, me baisait il bien ?

Oui et non !


Il faisait ce qu’il pouvait le pauvre.

Note qu’avant lui, si je savais pertinemment posséder un clitoris, j’aurais été bien en peine de le trouver.


Du reste, mon mari aussi l’a cherché longtemps. »


J'avais beau me dire que les histoires de cul que Marissa me narrait n'étaient , au fond , que des contes de vieille salingue s'amusant de la supposée candeur de celui qu’elle regardait comme un gamin bien moins aguerri qu'il ne le claironnait ; il m'arrivait encore d être troublé par l'émotion sincère colorant , par moments, sa voix altérée de tabac et d’alcool ; cette grande ombre janthine venue obscurcir son regard comme un drapé retombe sur le contre jour blanc d'une fenêtre ; ce sang pale affluant avec la fugacité d'un reflet de lune sur une pierre sacrificielle à la pulpe cireuse de ses joues.

Jouait-elle avec moi, à défaut de se jouer de moi ?

Jusqu'à quel point et selon quelles règles ?

« - A la mort de mon père, j’ai vendu à peu près tout ce que je possédais en Amérique, puis nous sommes partis.

En Europe d’abord, en Afrique ensuite.
Aux contreforts du Riff ; là ou la Méditerranée épouse l'Atlantique.
Tanger. Tu connais Tanger, bien sur.
C’est là que nous avons commencé à jouer à des jeux dangereux.
A l’époque, l’homosexualité était très mal vue et même pénalisée à peu près partout. Beaucoup de gays fortunés épousaient de jolies femmes qu’ils utilisaient comme une sorte de façade sociale, mais également, dans bien des cas, comme des appâts.
Des pièges à cons, des pièges à queues.

La femme au bout de l’hameçon, le mari ferrait la prise que l’un et l’autre se partageaient ensuite comme il se doit au sein de toute union fondée sur la communauté réduite aux acquêts.
Notre couple s’est bien divertit à ses manigances, sauf que dans ce cas précis, l’homme riche, c’était moi.

Les yeux des Marocains, si difficiles à relever, s'enflammaient lorsque je passais, voilée de transparences. Des petits groupes de jeunes hommes me suivaient de loin dans le dédale du grand Socco. Je les aguichais d'un sourire, d'un mouvement rond du bras, la main en étoile sur la hanche, les reins creusés je basculais mon ombrelle vers l’épaule pour laisser le soleil jouer dans mes cheveux blonds.
Les mômes se laissaient prendre à leurs reflets dorés comme des alouettes aux feux d'un miroir.


La suite n'était qu'un jeu de rôles assez banal en sommes.

Tu as déjà baisé avec un arabe, au fait ? »

« -Jamais.
« - Pourquoi, tu es raciste ?
« -Mais non, arrêtes un peu ! L’occasion ne c'est jamais présentée, voila tout !

« -Tu n’as pas perdu grand chose ! Des grosses bites, mais bourrines. Ca te tire pendant des heures sans la moindre imagination. Non, franchement, quelle déception !
En revanche les Espagnols ! Ah, les Espagnols!

Tu as entendu parler d’Almeria ?

C’était l’Ancienne capitale économique du Califat de Cordoue. Ca se situe au bord de la côte Andalouse, coincé entre mer et désert.


A la fin des années 60, Almeria était une sorte d'Hollywood sur Méditerranée ou les grosses productions internationales bénéficiaient, en plus de décors naturels superbes, de conditions économiques défiant toute concurrence.
Entre les prises de vue du " Shalako " d'Edward Dmytryk,la reine Bardot, magnifique et débraillée, aimait à y promener ses grâces patchouli et ses jupons flottants. Michèle Mercier, votre increvable Angélique, y retrouvait son Peyrac /Hossein pour un improbable western spaghetti-paëlla-cassoulet, intitulé "Une corde et un colt ". Face à Rodrigue/Charlton Heston, Sophia Loren avait les yeux de Chimène.
Sur les Ramblas qui, des hauteurs de la ville dévalaient vers la plage de sable noir de l'Alma Drabillas, on croisait le soir et la fraicheur venus, la beauté violente comme un appel au crime d'une Claudia Cardinale dont la voix évoquait un éboulis de cailloux dans un oued Tunisien à sec.


Et puis il y avait Ava, venue en voisine, Ava le plus bel animal du monde, qui dansait dans les Night Clubs du port, pieds nus comme la paysanne de Caroline du Nord qu’elle était restée

Attirée par la présence des beautifuls peoples, tel un essaim grouillant de guêpes par un rayon de miel, la horde Fellinienne des courtisans et des prédateurs déferlait sur la ville.


C’était toujours la même cour des miracles crasseuse et bariolée, de putains fragiles aux yeux fanés, de gigolos aux allures meurtrières de squales, de dandies androgynes et de pourvoyeurs d'illusions que l'on retrouve partout au monde dans le sillage de la gloire.


A la suite d'un caravansérail de vieillards dont les traits figés dans le bronze de leurs fards évoquaient les masques mortuaires de la Haute Egypte que nous avions connus à Tanger, mon mari et moi avons suivi le flot des Hébreux vers la terre promise.
Lassés des palaces, nous avions loué, dans les collines, une grande villa d'inspiration Mauresque perdue au fond d'un jardin tropical bourdonnant et fleuri.
C’est sans doute là que j’ai vécu les moments les plus heureux de ma vie.


Enfin, heureux, peut être pas.
Au moins paisibles.

Nous étions attentifs l'un à l’autre. Nous touchions du piano à quatre mains. Nous discourions des heures de poésie ou de psychanalyse.
C’est sans doute ce à quoi ressemble la vie.
La vie des gens, je veux dire. Les vrais gens.

Puis nous avons connu Tatiana. Celle que ta mère appelle la « Pute de Riga », quoi qu’à y réfléchir je ne sais laquelle est la plus pute des deux,Tatiana qui s'enorgueillissait de pouvoir fournir n'importe quoi à n'importe qui, pourvu qu’on y mit le prix.
Nous nous sommes liées d’amitié, elle et moi, au point que mon mari en prit ombrage.
On s’amusait comme des folles toutes les deux. On riait d’un rien, on osait tout.

J’avais enfin quinze ans.

Fine mouche, Tatiana détourna la ire de mon plus tant que ça époux en lui adressant un bouquet, non pas de roses jaunes, mais de solides pêcheurs parfumés à la marée, à l'oignon frais et au Condado de Huelva, ce rouge ordinaire que l'on servait dans les tavernes.


C'est grace à Tatiana que j’ai rencontré le seul véritable amour de ma vie, la fée cocaïne.

Sous l'emprise de la drogue, j’oubliais mes terreurs et mes démons. Je devenais, enfin, humaine. Je me dégelais, me décoiffais, me démaquillais. Je troquais mes satins givrés contre des jeans délavés et des T-shirts coupés au dessus du nombril. Je bronzais les seins nus aux commandes d'un Riva d'acajou que je lançais à travers la baie à la poursuite de la flèche d'argent que traçait au ras des flots l’échine des marsouins. Je croquais la vie comme on croque dans un fruit d’été, sans se préoccuper du jus qui macule le menton. La Candy C me donnait un air de santé éclatant.


Alarmé par ce changement dont il devinait la cause, le Français tenta de me rattraper sur la pente ou je glissais. Il fut prié, gentiment, d'aller se faire enculer et pour que la chose soit bien certaine on lui fournit autant de gigues qu’il pouvait en consommer.


Il c’est d’ailleurs barré avec l’un d’eux.
Un Italien.


Je l’ai revu des années plus tard à Rome. Son mec l’avait détruit physiquement et mentalement. Il était malade, accro au Brown sugar, quasiment miséreux. Nous étions toujours mariés pourtant jamais il ne m’avait demandé quoi que ce soit.
J’ai voulu l’aider, bien sur mais il a refusé. Je crois qu’il prenait du plaisir à sa déchéance.
Le stade ultime du masochisme.


Il est mort peu après.


Donc me voilà veuve.
Et joyeuse! Let’s go to « Maxim’s ».


Mais au fait, c’était quoi ta question au début ?
Pourquoi j’aime tant les pédés ?

 


 


 

 

 


 

 

 

 



 

 

Les commentaires sont fermés.