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Nudités - Page 3

  • " Lettre d'amour en agonie."

    zStef-Serre-Che.jpgJ’ai rêvé de toi, dans ce qui sera probablement mon premier et dernier sommeil jusqu’à demain.

     


    Mon homme sacrifié.


    J'ai rêvé de toi, et comme d'habitude je ne voyais que tes yeux, aussi durs que des silex prêts à m’enflammer.

    J'entendais ta voix toute en nerfs, dérocher un cœur que d’un mot, d’un simple et sec mot, tu savais étriller comme on polit un gemme pour en ôter la patine.

    Je n'avais pas mal.

    Je connaissais la fin de l'histoire ; je savais que jamais je n'en finirai de débouler ce Golgotha de pierres noires au pied duquel tu ne cessais de me jeter.

    Mon homme martyrisé.


    Et ta voix au fond de mon sommeil dont l'accent musical ne dissimulait pas l‘amertume, me disait :


    « -Je n'arrive plus à te choper entre deux défonces ; c'est d'alcool et de coke dont tu as besoin pas de moi.»


    Je me suis réveillé moite et opprimé; cherchant dans le lit à mes cotés un corps à enlacer.

    Chris, n'importe qui ! Je n'ai trouvé que la fraicheur des draps d'ou montait un parfum familier.


    Foutue vérole; pourquoi faut il encore que tu m'embêtes ?

    Ne peux-tu achever de pourrir au fond du marécage ou je t'ai moi même couché ?

    Pourquoi surgis tu superbe et vengeur là ou je ne t'attends plus, paré de l'armure d'argent de Saint Michel, ta tête d'archange couronnée d'épines d'or d'ou dégoute le sang de mes mains ?


    Et ton visage que je cherche au fond de ma mémoire sans jamais le trouver ; ou alors si abimé, si chanci que je ne le reconnais plus.


    Est-ce un hasard si la seule photographie que je garde de toi te montre en combinaison de ski et bonnet ridicule au pied du Prorel à Briançon?

    Si je la regarde souvent cette photo, c’est parce qu'elle est la dernière sur laquelle tu portes encore au visage, cet air d’innocence, cet air d’insouciance, cet air de jeunesse enfin, de ceux qui croient aux rimes pauvres.


    Amour, Toujours.


    Les autres clichés montrent l'apparition de la lèpre qui peu à peu ronge tes joues, moisit tes lèvres, éteint tes yeux en escarboucles; le long pourrissement de tes illusions ; le chemin de croix vers la haine et l'oubli des serments.


    J'ai encore parfois de tes nouvelles ; de loin en loin.

    Les tapettes, toujours charitables ne me ménagent aucun détail.


    « - J'étais à Marseille, le week-end dernier. J’ai rencontré ton ex au « Cancan ». Il est superbe. Jamais je ne l'ai vu aussi épanoui, ça doit être le bonheur ! Bizarrement, il ne m'a pas demandé de tes nouvelles. Que veux tu un amour chasse l’autre. »


    Mais que m'importe ton bonheur si tu ne le tiens pas de mes mains d’illusionnistes; toi qui m'aimait tellement que tu pleurais au gâchis de ces années ou nous ne nous connaissions pas; toi qui disais " mon cœur " même lorsque tu pensais à mon corps; toi cet agneau changé en loup par la grâce de mes incantations; toi qui me pendis au gibet même que je te destinais.


    Etrangement, tu n’as jamais été plus présent dans ma vie que depuis que tu en es sorti.

    J'ai conservé comme des trophées, comme des reliques les quelques objets que tu as oublié dans ta fuite en avant.

    Une paire de Creeks déformée à force d’être portée mais que tu ne pouvais te résoudre à jeter puisque je te l’avais offerte; un tee shift des Chicago Bulls acheté dans Tribèca au sortir d'un Delicatessen ou une noire à chicots nous avait dit la mauvaise aventure dans un sabir vaudou semblable à un anathème; un CD d'Ute Lemper ironiquement intitulé "Crimes of the heart", une  première édition  de " Belle du Seigneur ", ce pavé d'amour fou dont jamais tu n'avais voulu connaitre la fin.


    Jusqu'a mon deuil que je parfume à l'eau de " Toi "; une essence étrange et étrangère de fleurs blanches, de cédrat confit, de mousse verte, de poivre rouge; un puissant concentré de mélancolie dont je vaporise mes draps et mes oreillers.


    Pour être un peu moins seul.
    Pour être on peu plus triste.


    Sais tu qu’au temps de nos folies, pas un jour ne se passait sans que j'évoque avec terreur le moment ou nous cesserions de nous aimer?

    Je me rassurais du mieux que je pouvais en songeant que je me lasserais le premier, puisque de nous deux j'étais le futile, le volage, le volatil ; toi le concret, le terrien ; " le paysan " disait on dans ton dos, sur un ton de négligence enjouée qui cherchait à t'épingler tout en évitant de me blesser.

    J'avais le cœur et les poches percées, les mains d'un Christ au tombeau. A peine avais je obtenu ce que je convoitais que, déjà, je n'en voulais plus.

    Le désir me comblait d'avantage que la possession. Je donnais tout, je jetais tout, je ne m'attachais à rien de matériel, je ne m'économisais jamais dans quelque domaine que ce soit.

    Toi au contraire, tu engrangeais, tu thésaurisais, tu mettais en banque.

    Il me semblait que mon amour était un silo fêlé dont le grain s'écoulait lentement alors que tes greniers craquaient de tout leur bois, tant tu les avais emplis en prévision des jours difficiles.
    Et puis non, comme d’habitude, j'avais tout faux.


    Zéro pointé vers l’infini.


    Sait on jamais le jour et l'heure des adieux qui sonnent comme des au revoir, du dernier regard filant comme une truite argentée dans le tumulte d'un torrent, du dernier mot que l’on n’écoute pas; du dernier baiser que l'on ne goute pas?


    Tu partais quelques jours dans le midi visiter tes parents. Ta valise à tes pieds, tu m’as embrassé. Un baiser semblable à tous ceux que nous avions échangés, aussi nombreux qu'un peuple de colombes. Je t'ai rendu ce baiser sans y penser ou en pensant à autre chose ; à la légèreté estivale du petit matin, à cette semaine sans toi ou j'en profiterais pour ne rien faire de contraignant ni d'ennuyeux ; au poker que j'avais organisé pour le soir même, en cachette puisque tu détestais me voir jouer, aux cadors que j'y avais conviés, lesquels donneraient à la partie des allures Russes et mortelles.


    Notre dernier baiser, mon pauvre amour, ma flétrissure, résonne encore en moi de l'écho désespère d'un brelan contré par un full.


    Tu a passé ce seuil que tu ne franchirais plus jamais, les épaules un peu voutées mais le pas décidé.

    J'aimerais pouvoir écrire que tu t'es retourné pour caresser du regard et moi et le décor de nos années de passion, mais non, tu t'es épargné cette cruauté inutile.

    La porte s'est refermée sur mon bonheur avec un petit bruit métallique.


    Ta lettre est arrivée quelques jours plus tard, très triste et très marrante, à mon image plus qu'à la tienne.

    Je ne l'ai pas lue jusqu'au bout ; je la connaissais d'avance par cœur. A croire que je t'en avais dicté le moindre mot.


    J'ai éprouvé sur le moment un soulagement un peu lâche, un peu bête.

    Le film était terminé, la salle se rallumait, la vie reprenait ses droits.

    Je ne monterais plus nos escaliers la peur au ventre en me disant que si tu étais à la maison nous allions encore nous battre pour des broutilles ; que si tu n'y étais pas j'allais me ronger les sangs à échafauder des scénarios catastrophes qui te montreraient dans les bras d'un amant.


    Je savais, bien sur, que tu voyais quelqu'un depuis un moment. Tu ne me l'avais d'ailleurs pas caché, devant mon obstination à traquer des indices de roman policier dans la moindre de tes attitudes.

    Du reste je l'avais deviné avant que tu ne le réalise toi même que celui ci ne serait pas une passade de quelques nuits.

    Il y a des choses que l'on sait d'avance parce qu’elles sont inscrites de toute éternité dans les étoiles du ciel comme dans la poudre des déserts; ainsi la certitude irraisonnable, irraisonnée que cet homme là, que je ne connaissais pas, dont j'ignorais et le prénom et le visage, t'arracherais à moi.
    Mais au fond, on ne meurt pas d'un cœur qui fane. Tu étais parti, grand bien me fasse. J'avais vingt cinq ans, un corps ferme et sain, les yeux du diable et les dents du bonheur.

    L'avenir souriait à travers mes sanglots.

    Très vite, trop vite, j'ai connu un autre garçon; plus beau que toi, plus brillant infiniment ; un garçon qui me convenais d'avantage puisqu'il me ressemblait. Il eut le mérite de m'aimer et le courage de me quitter au mobile qu'il n'était pas fait pour les ménages à trois et " téléphone-moi lorsque tu l'auras oublié ».


    J'ose espérer qu'il s'est lassé d’attendre.


    C'est alors que j'ai reçu le fameux « coup de buche dans une embuche », méchant, vicieux, à me mettre à genoux, les paumes au sol, un grand cri au ventre.

    Je t'ai cherché partout, ne t'ai trouvé nulle part.

    Tu étais sorti de ma vie par effraction pour n'y plus revenir.

    Tu coulais des jours, sans doute heureux, ailleurs, loin.

    Je t'avais perdu.


    J'ai continué à faire semblant, par habitude.


    On met un pied devant l’autre, on s'aperçoit, incrédule, que l'on avance; on rit trop haut, on parle trop fort, on embrasse qui l'on veut .On se montre gentil par je ne sais quelle ironie qui veut que plus l'on souffre plus le cœur soit bon. On jure que l'on aimera encore, demain, tout de suite, le premier qui passe, qu'il vous plaise ou non .On ne trompe personne.

    L'enveloppe est toujours belle, colorée, attrayante, mais sous un teint de soleil, l'hiver sévit.
    D’ailleurs, ce n'est pas un hiver que cachent mes oripeaux d'aimable noctambule, mais la plus délabrée des ruines.


    Qui donc a écrit " Il existe de beaux hivers, jamais de belles ruines " ?

    Et puis, il y a les souvenirs que l'on déterre à coups de pelle furieux comme on cherche un trésor. Eux aussi ont morflés les souvenirs, leurs teintes vives ont passées, certains se sont carrément effacés.


    Tu te souviens, toi, de la dernière fois que nous avons fait l'amour ?
    Est ce que tu savais, toi, que c'était la dernière fois ?


    Je ne me rappelle plus, je ne me rappelle pas.


    T'ais je aimé avec ferveur comme on étreint un corps mourant ou avec la légèreté insoucieuse de l'habitude ?


    Etait ce le jour, était ce la nuit, dans notre lit pendant un orage; dans les escaliers le dos meurtri par l’arrête des marches, au creux d'un vallon planté d'églantiers ?

    Avons nous rit, ensuite, pantelants et trempés ou avons nous cognés nos fronts, accolés nos visages, croisés nos regards avec cette fureur presque religieuse qui nous blessait parfois ?


    Je ne me rappelle plus, je ne me rappelle pas.


    Le plus difficile est de me dire que je te reverrais peut être un jour.

    J'évite la P.A.C.A, et si d'aventure je me vois obligé de m'y rendre, je tremble à l'idée qu'un hasard bête de la vie nous fasse nous croiser.

    J'ai peur de te revoir, de te trouver changé, embourgeoisé, repu, bouffi d'un bonheur tranquille et sans histoires, embaumé par ta réussite sociale, veule et enfin laid. J'ai peur des regrets.

    J'ai peur de devoir me dire que je me suis détruit pour toi et que ça n'en valait pas la peine.


    Moi je n'ai pas changé ou si peu. La futilité protège des outrages du temps. Je vais, adolescent, superficiel et léger et tant pis si depuis toi, je n'ai jamais aimé que toi.

    Lara Fabian: " Pas sans toi"


    podcast

  • " Depression au dessus du jardin."

    zzzzzzzzzzzzzzzv-j-0215.jpgJ’ai changé, ne me déplaise !
    Enormément ! En peu de temps !
    Est à cause du passage périlleux à la trentaine ?

    Est-ce à cause de Christophe ? De notre relation désastreuse semblant ne vouloir ricocher que dans des directions défavorables ?

    Naguère , mon énergie , ma vitalité , mon intenable impudence , cette manière éhontée de ne pas tenir en place sans jamais chercher la mienne ,de semer des tempêtes pour un tout , pour un rien , pour un tout petit rien ; de vivre mes amours comme on force un blocus , de les immoler ces amours sur des buchers aux allures de gaillards feux de plages , ce sacré chambard accompagnant la désinvolture de mes envols vers d’autres bras , d’autres draps ,d’autres impostures ; faisaient de mon existence un déluge , un océan en furie.
    Déluge, j’en ai brisé des digues, j’en ai inondé des plaines, j’en ai submergé des montagnes, dévalé des précipices.

    Océan, j’en ais fait des vagues, toutes identiques, toutes différentes!
    Berceuses de barcasses, chavireuses de chalutiers, briseuses de cargos.
    Vous n'en avez pas passé une, que déjà, la suivante se pointe en rafale.
    Elle vous prend en traitre , elle vous soulève , elle vous élève vers ce que croyez être le soleil , elle vous attire puis vous repousse , elle vous enveloppe , elle vous borde , elle vous déborde , elle vous roule , elle vous boule , elle vous envoie valdinguer dans les abysses .

    Vous avez de l'eau dans les yeux et les oreilles, du sel vert et acide dans les narines, un bouquet d'algues pourries dans la bouche ; si vous ne vous noyez pas, Dieu est avec vous.

    Ou le diable, allez savoir !

    La vie ça s'appelle la maladie que j’ai attrapée en naissant.
    La vie magistrale. La vie plus grande que la vie !
    « Biger than life » en français tel qu'on le cause.
    La vie broyeuse d'autres vies. La vie exigeante, impitoyable, immense et animale.
    La vie torrentielle !

    Mais voici que les temps changent. L’océan est une flaque, le déluge une bruine, « Mauvaise. Graine » une épave.

    La vie , ma vie , cette vie , je la régurgite en un lent , long ,lancinant écoulement , une sanie noire et malsaine , qui me laisse faible, appauvri, vagissant comme au creux d'un berceau .

    Pourquoi on se lève, pourquoi on se couche, pourquoi on bosse, pourquoi on baise, pourquoi on baise plus ?

    Pourquoi fais-je semblant d’écrire ?

    Pourquoi ses longs yeux d’ambre liquide ce sont ils changés en deux petits lacs gelés, ternes, occultes ?

    Je fus , pour l'unique fois de ma vie , un petit ami parfait , un ami parfait , un amant parfait . J'ai enchanté ses nuits, ses jours et ses rêves. Je lui ai offert des voyages autour de mon lit, des bouquets de rire, de perles, de mots. Je l’ai consolé, je l’ai cajolé. Je l’ai rendu plus beau que beau. Je l’ai baisé à m'en peler la bite.

    Je fus le roi, le fou, l’illusionniste, l'esclave accroupi.

    Je suis une cloche !

    Ce soir, nous sommes passés à un poil de cul de la catastrophe, à un frisotis du dernier Bing Bang.

    Je le voyais venir et je serrais les poings.

    Cette douceur dans la voix, cette fièvre soudaine hachant son débit, ces hésitations, ces phrases qui finissaient en soupirs, cet abandon que je ne lui connaissais pas.

    Les mots qu'il n'osait prononcer déchiraient l'opacité de son silence.

    J'ai prié : pas maintenant, pas déjà, pas comme ça !
    Il a compris, je crois.

    Il a dit : « -Bon, je me couche, moi ! Dors bien fais de doux rêve !
    « _ Ok, bonne nuit.
    « _ Tu sais, je ....
    « _ Tais toi !

    J’ai quitté la chambre.

    Deux heures du mat et des minutes.
    Fin de partie au Sans-soucis !
    Au rez -de- chaussée j’ai récupéré une bouteille de Vodka, beaucoup de glace !

    A présent, gelé comme un coing, presque délivré de la conscience de mon corps, l'esprit en déroute, le cœur calebasse battant sous des paumes africaines, j’attends de sombrer dans ce « sommeil ivre » dont parle Rimbaud.

    En pure perte !

    A cette heure de la nuit et dans l'état ou je me trouve, j’oublie d’ordinaire la cause de mes tourments.
    Je me sens même, la plupart du temps, assez d'humeur à me lancer dans des digressions illuminées sur la vie, l’amour, la coiffure, le vin.

    Le point de non retour atteint, déjà en terre lointaine, les mots me viennent comme des chocs, pitreries, agressions, jetés battus, « je-t-ai-battu », hideuses têtes d'Iokanaan au poing sanglant de Salomé.

    La logique ainsi qu’un petit pantin désarticulé, funambule sur un fil ténu, tendu entre deux paradoxes. Les idées fusent, fusionnent, s'estompent aussitôt.

    Délire, verbiage, clairvoyance.

    Références aux princes de la cuite: Baudelaire, Apollinaire, Audiard, le grand serge!

    "Dépression au dessus d'un jardin
    Ton expression est au chagrin
    Tu as lâché ma main
    Comme si de rien n'était.
    De l'été c'est la fin
    Les fleurs ont perdu leurs parfums
    Qu'emporte un à un
    Le temps assassin."

    Gonflé d’importance, pédagogue sentencieux, je cherche à me convaincre, à coups d’aphorismes d'argile, que l'alcoolisme pas plus que l'amour n'a besoin de raisons. Que l'on cherche toujours des excuses plus que des explications. Que j’aime boire moins par goût de l'alcool que pour l'ivresse qu'il procure.

    Que je bois pour oublier.

    Oublier qui ? Oublier quoi ?

    Oublie-moi toujours, jamais je ne t’oublierais.

    Le crabe dans les vapes affute ses ciseaux. L'alcool sur la plaie fait comme du sel, il brule sans cautériser. Il n'a ni beauté ni bonté.

    Pouvoir thérapeutique ?

    A dose homéopathique, sans doute.

    Quatre verres de vin te feront le cœur sain, le sang fluide, les artères souples.

    Quatre verres de vins ? Cuite mesquine !

    Moi, je bois tel un soudard, pour la destruction et la gloire.
    Gloire des armes, gloire des larmes, gloire mensongère des tréteaux, gloire des fontaines et des Bacchantes, gloire chavirante des bateaux.

    Boire pour s’oublier, se transmuter, se transformer.

    En quoi ? En objet de risée, en dindons de farces bouffonnes ?

    C'est une maladie que l’alcoolisme, une maladie honteuse.

    Les cancéreux apitoient, les alcooliques prêtent à rire. Ils quêtent de l'amour et ne récoltent que des lazzis.

    Ce soir je pourrais tuer pour une déclaration d’amour !

    Une qui aurait de la gueule, de l’allure, du panache !

    Comprenez moi, je suis comme Sophie Marceau dans " La boum 13 : Romance à l'hospice ", je n'ai rien contre le fait qu'on me dise " je t'aime "; mais pitié Messieurs, un peu de classe, un peu d’audace, un peu d'originalité !
    Soignez le décor, soignez la présentation ; mettez un costard et genou à terre. Sortez les fleurs et les confettis, les revolvers et les couteau. CInvoquez les violons de Baudelaire, les orages furibards des sœurs Brontë, le technicolor flamboyant des mélos de la «  MGM  ».

    Ne le dites pas au téléphone.

    Encore moins par SMS.

    Surtout pas sur MSN.

    Par signaux de fumée, à la limite vous le pouvez.

    A condition de vous appeler Sitting Bull, bien sur.

    Ah, vous vous appelez Christophe ?
    Glad to met You. My Name Is Graine, Mauvaise. Graine !

    Vous êtes un petit breton, fils de la pluie et des marées. Dans ce cas, donnez-vous un petit peu de mal.

    Faites rugir l’Atlantique, faites gueuler les goélands, chapardez les mots de Chateaubriand et faites m'en offrande.

    " Mon dernier rêve sera pour vous "

    Vous devez vous dire, elle est mignonne la « Mauvaise. Graine » ; mais c'est un truc de midinette que d'accorder tant d'importance à deux notes et demi de musique que certains vous chantent aussi souvent que " Bonjour comment ça va ? " dans une journée ; que de toute façon, il n'y a pas d'amour mais des preuves d'amour et patati et patalaire, l’infini à portée des caniches.

    Peut être avez vous raison.

    Moi, je suis persuadé qu’un " Je t'aime " n'est jamais innocent.
    C'est une balle de revolver qu'un " Je t’aime ».

    Ou il vous effleure sans vous blesser, ou il vous explose le cœur.

    Tant qu'a faire, s'il doit me tuer que se soit en apothéose.

    Je veux des fanfares et des vivats, des serpentins et des ballons, un ciel tonnant de 14 Juillet.

    Et tant pis si au fond, moi, je ne l’aime plus.

  • " Le premier matin du monde. "

    zzzzzzzzz-cricri-autheuil-0.jpgSi la marée m’avait emporté, sans doute me serais je assoupi, apaisé, assouvi, gisant de chair fermé sur l'écho de mon plaisir.

    Mais la mer est loin déjà, la plage immense et vide; mon corps oublié sur le sable qui le blesse sonne creux et lourd des accords d une sonate avortée.


    A la dérobée, j’observe Chris, assis en caleçon et large chemise ouverte à un petit bureau un peu démodé, probablement signé Grange; ses mains habiles et légères volant sur le clavier de son ordinateur.

    Le profil sans défauts du drôle se perd dans un glacis de lumière cérulescente ou s’estompent le nez court et droit, tout retroussé d’impertinence, la grâce sensuelle des lèvres meurtries, le modelé lisse et rond du menton.


    Certes Chris est beau.
    Beau à en mourir.
    A en mourir d’amour.


    Cependant, la joliesse exquise de ses traits porte en elle même sa propre limite ; l’égale monotonie d’un paysage dépourvu d’imagination ou l’on aimerait trouver, dans une brisure infime des lignes, dans un hiatus léger des couleurs, quelque subtile irrégularité propre à en pervertir la pureté.


    _ Christopheeeeeeee !


    Je feule comme un matou en rut.
    Allongé sur le ventre, tout à fait nu; je tends vers lui un bras interminable et tentaculaire.


    _ Christooooopheee , viiiiiiens !


    Il dit " j’arrive.», il dit " attend ", il dit

    " tu n’en as donc jamais assez ».


    Il fait le fier, il fait le fort.
    Il rit de folle adolescence.


    J’ai envie de lui faire rentrer ce rire au plus profond de la gorge.
    Me reviennent alors, comme des chocs, comme des chutes, les images de cette aube fondatrice, de ce premier matin du monde, lorsque nous avons unies nos grâces dépareillées au sortir d’une nuit aussi liquide et translucide que la vodka qui lentement coulait son flux froid dans nos veines. Un café et une orange pressée dans un bar sur le port tandis que les serveurs lavaient les terrasses au jet. Une ancienne rengaine de Pupo à la radio, « Su di noi, encor’una volta, dai, su di noi … ». De grands bateaux à quai et l’absence presque totale de vent.
    Il n y avait pas beaucoup de lumière, pourtant Chris rayonnait, cuirassé d or et d’enfance.


    Se pourrait il qu’il se souvienne de notre promenade dans le dédale du Sottopiazza déserté par les fêtards, de nos corps s accordant au rythme d’un pas égal ; de nos visages argentés se reflétant l' un l' autre; de nos yeux phosphorescents et maladifs trouant l’obscurité projetée par l’escalier sous l’arche duquel nous nous étions réfugiés.


    Moi, je garde la mémoire encore assez émue des lèvres de Chris, presque dures dans mon cou ; sur ma bouche, soudain, vivantes et avides ; des mots qu’il prononça juste après le baiser : " Je crois que nous allons avoir une bien belle fin d’été.»
    L’été de tous nos possibles est terminé, nigaud, voici venir l hiver de nos désillusions.


    « Mauvaise . Graine », figure de fifre, arrête donc de te pencher sur ton passé, tu vas tomber à la renverse ; arrête donc de gâcher ton quotidien à coup de petites cruautés inutiles comme on plante des aiguilles dans une poupée vaudou et puisque l envie te prend de faire un crime ; cours, vole, sauve toi, sauve le.
    Que diras tu aux juges lorsqu’ il faudra raconter, expliquer, mentir encore, mentir toujours ? Christophe avait cessé de me ressembler ? Christophe commençait à me ressembler ?


    Hélas, on ne coupe plus la tète aux pauvres fous.


    Mais enfin, qu’attends-tu de cet amour puisqu’il est médiocre ; puisqu’ il manque d élan, de flamme, de souffle ?
    Il te gène cet amour, il t’embarrasse, il te pèse. Il est aussi naïf et maladroit qu’un dessin d’enfant.
    Rassurant, cependant, il te dit qu’à plus de 30 balais consumés tu es encore capable d’enchanter les rêves Brocéliande d’un plus jeune que toi, d’un plus beau que toi. Il farde d’un doigt d’aurore ton masque exsangue de noceur ; il enlumine ton orgueil de volutes dorées, il charme ton corps rompu pourtant à toutes les indécences, il s’échoue aux douves de ton cœur forteresse.


    Pourquoi Chris a- t- il soudain, alors qu’il se détourne de son écran, ce sourire vague, incomplet, trébuchant sur l’arc souple de ses lèvres avec la grâce hasardeuse d un début de sanglot et que j’aime beaucoup ?


    « -C’est quoi déjà le nom complet de L.A ? Me demande t il.


    Je grommelle pour la Nième fois :

    « -Pueblo de Nuestra Señora la Reina de Los Ángeles del Río de Porciúncula


    Chris frappe son front du plat de sa paume.

    « -Putain, c’est trop naze un blaze pareil ! Jamais je ne le retiendrais. Et même si je le retiens je n’arriverais pas le prononcer.


    Je ramène sur mon sexe en déconfiture les plis d’un drap malmené par nos ébats.

    « -On s’en branle, Christophe. JE m’en branle. Tes clients s’en branlent. Tout le monde s’en branle.


    Aimable la « Mauvaise . Graine » à 5heure du mat, lorsque quasiment à sec de sperme mais point d’idées salaces elle espère tirer sa dernière crampe avant le passage du marchand de sable.


    Et pendant ce temps, au lieu de lui mignoter la friandise, à quoi s’occupe « l’unique objet de son ressentiment » ?
    Croyez-le ou non il surfe sur la toile.


    Pas même sur des sites de cul, pauvre malheureux.
    « Le blog d’un trou à jus », « Le journal d’un sac à foutre », « Les mémoires d’un glory hole », « Xtube », « Porntube » ; pas le style de la maison.


    Que croyez vous qu’il fasse tandis que ma bite mollit, le choupinou favoris de mes noix de Cajou ?

    IL REVISE !


    Le programme de son prochain contrat !
    Los Angeles, California !
    Le « Hollywood Babylon Tour », attrape blaireaux inscrit au catalogue d’un Tour Operateur concurrent de celui qui m’emploie.


    Je vous jure, on colle cette scène dans un film, le scénariste a intérêt d’aller se planquer à Bikini, sinon c’est un homme mort !


    Pleurez Margot ! Ma vie sexuelle est un désert, ma vie sexuelle est un désastre !
    Voilà sans doute pourquoi, j’écris autant de conneries!