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" Chronique d'un dépucelage programmé." ( 4)

 

 

zz-vaniacorsica-sunset.jpg« Sexe, mensonges et toiles de maitres. »

 

Ce fut donc avec le plus parfait naturel, comme si la chose allait de sois et n’appelait aucune contestation, que je m’installais chez Stan, ou du moins chez le mystérieux « ami » de Stan.
J’avais raconté à Sasha un bobard à ma manière, selon lequel des copains de classe seraient rentrés plus tôt que prévu à Paris en raison d’un terrible incendie dont leur résidence Varoise aurait été la proie – J’ignorais complètement s’il y avait eut des incendies dans le Var cet été là, cependant je me disais que puisque le Midi cramait à peu près tous les ans sans que ma jolie tante ne s’en préoccupa d’avantage que de ses premières socquettes, je ne risquais pas grand-chose à enflammer le Sud de la France d’Avignon à Juan-les-pins -, que les copains en question m’avaient invité à profiter de leur piscine, le soir après les répétitions, et que, tu comprends, leur propriété se trouvant située aux confins de Saint Cloud, autant dire en terre Adélie, je ne pouvais décemment exiger de leur père qu’il me ramenât boulevard Diderot à des heures indues.

Sasha avait feint de m’écouter, feint de me croire, tandis qu’elle achevait de farder d’un beau rouge fauve sa bouche large et spirituelle, hochant de temps à autre la tête l’air de dire « Et mon cul c’est du poulet... t’en veux une aile ?», mais n’avait pas élevé d'objection majeure à ce que je me fasse la malle, posant pour seule condition que mes prouesses nautiques n’empiétassent pas sur mon « emplois » au théâtre ou je continuais donc à jouer les anges de miséricorde, comblant avec diligence et aménité tous les petits caprices des uns et des autres et particulièrement ceux de « l’infante », la malheureuse s’en allant en eaux depuis que Stan lui avait signifié son intention de ne pas réitérer « le coup du Rocking-chair », au motif que ne l’aimant pas dans la pièce il ne pouvait se permettre de l’aimer dans la vie sans altérer la sincérité de son jeu.

Du coup, la sorcière avait reporté ses soupçons sur Sasha, laissant entendre à qui voulait bien lui prêter l’oreille que si les scènes entre le prince et Inès de Castro vibraient d’une telle intensité, en dépit des talents dramatiques extrêmement limités de leurs interprètes, c’était bien à cause d’une attirance mutuelle indéniable.

Sasha, on s’en doute, se fichait comme d’une guigne d’un garçon qu’elle savait aussi pédé qu’un foc de baleinier, cependant , par malice, elle ne perdait pas une occasion de faire enrager sa rivale en prodiguant à Stan des attentions et des agaceries qu’il acceptait complaisamment avec une mine nantie de Nabab et un sourire narquois de joyeuse canaille.

Etrangement, je prenais ombrage de leur complicité.

« - C’est quoi cette combine à retourner le brouillard entre Sasha et toi ? Vous n’arrêtez pas de vous tripoter excités comme deux puces à marée basse ! Vous avez l’intention de filer au bois jouer au petit loup ? Râlais-je lorsque nous nous retrouvions chez lui après avoir emprunté des itinéraires soigneusement séparés.

« - Pourquoi pas, elle est canon ta tante ! Ironisait-il dans un sourire élégiaque.

« - Sur, on se ressemble ! Précisais-je comme on souligne une évidence.

« - Dans le coté salope, votre parenté ne laisse aucun doute ! concluait-il en m’ôtant mes vêtements.

Faire l’amour dans un lit ou on aurait put coucher Ali Baba et les quarante voleurs sans qu’ils ne s’y trouvent à l’étroit, m’était une expérience nouvelle que je goutais avec volupté, même s’il m’arrivait parfois de regretter le « Tunnel » et les acrobaties auquel son inconfort nous contraignait.

Il me semblait que notre liaison prenait des allures mollement bourgeoises depuis que les fanfares vandales dont elle retentissait viraient au riant pizzicato des Mandolines Milanaises dans les splendeurs Impériales d’un palais d’été, posé comme un jouet scintillant au cœur paisible de l’Ile Saint Louis.

Que Stan qui ne sortait pas de la cuisse de Jupiter mais d’un bar P.M.U de la région Nancéenne, et que l’on disait pauvre comme Job, puisse occuper, fut ce à titre d’invité, une demeure de ce standing, éveillait en moi une curiosité chaque jour plus vive, d’autant que l’identité du nébuleux propriétaire des lieues me demeurait une énigme digne de celle du Sphinx.

Aux questions que je posais, mon amant répondait de manière allusive et voilée, n’hésitant pas, la plupart du temps à manifester un agacement propre à aiguillonner mes soupçons.
Oui, son « ami » disposait d’une solide fortune.
Oui, il était collectionneur et Antiquaire de son état, ceci expliquant le nombre de pièces d’exception décorant sa résidence Parisienne.
Oui, il l’hébergeait par pure bonté d’âme.
Non Stan n’était pas le gardien rémunéré du temple.
Non, l’ « ami » ne séjournait pas souvent dans la capitale, ses affaires l’appelant dans le monde entier.
Non, inutile d’insister, je ne connaitrais pas son identité, pas plus que la nature des liens l’unissant à Stan, et puis arrête maintenant, tu m’énerves à jouer les Rouletabille, on est là pour baiser pas pour élucider le mystère de la chambre jaune.
Le plus étrange au sein de ce sirop de mélasse résidait dans le parfait manque de personnalité d’un lieu auquel l’abondance de Corot, de Matisse, de Modigliani, de xylographies d´Albrecht Durer, de bronzes signés Pierre-Jules Mène ou Van der Cruse Delacroix, Chapirus ou Cartier, d’argenterie Puiforcat et Boin Taburete, d’un mobilier griffé Duval, Majorelle, Boule, conférait une atmosphère austère, un peu inquiétante de musée fantôme, fermé aux visiteurs puisque Stan n'y recevait jamais personne .

Excepté dans la chambre que nous occupions, sa salle de bain, et la cuisine ou nous prenions nos repas, nul désordre, nulle confusion, nulle trace de vie brouillonne ne venaient troubler l’agencement rigide des salles et salons.
Le dressing ne contenaient rien d'autre que la maigre garde robe de Stan, le cabinet de toilette ses produits d’hygiène et de soins.
Dans les armoires, les tiroirs, que j’explorais scrupuleusement profitant du sommeil de mon compagnon, je ne trouvais que du linge de maison, des objets usuels et sans grand intérêt. Pas de lettres, pas de papiers, pas de factures, rien en somme qui signalât que cette maison fut habitée avant que Stan ne l’occupe.
Plus curieux encore, l’absence totale de photos, les cadres d'argent et de bois précieux sur le piano ou les commodes ne contenant pas la moindre image.
A Croire qu’avant mon arrivé Stan s’était hâté de faire disparaître toute trace de son « ami ».

Mon esprit tortueux en déduisit que ce dernier devait être extrêmement connu pour qu’un garçon aussi ignare que je l’étais soit susceptible de l’identifier à la vue d’une simple photographie.

De là à imaginer que l’homme auprès duquel je dormais chaque nuit gigolait glorieusement entre les draps d’une célébrité Internationale, il n’y avait qu’un pas que je franchis allègrement, bien décidé à tirer toute cette histoire au clair.

 

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